La République populaire de Chine accentue encore ses pressions militaires contre Taïwan. Récurrentes depuis plusieurs années, ces opérations militaires maritimes et aériennes contre Taïwan, qu’elle estime faire partie de son territoire, se sont encore intensifiées ces derniers jours dans le détroit de Taïwan et au-dessus de l’archipel de Penghu. Cette stratégie de tension permanente s’inscrit dans un contexte politique taïwanais singulier, à moins de dix jours de l’investiture du nouveau président William Lai, 64 ans, élu en janvier dernier.

23 avions de combat et cinq navires de guerre

Les autorités de Taipei ont d’abord annoncé jeudi 9 mai avoir détecté 23 avions de combat et cinq navires de guerre chinois autour de l’île de Taïwan, notamment près de l’archipel de Penghu. « Huit des avions ont franchi la ligne médiane » qui coupe en deux le détroit de Taïwan, une étroite voie maritime de 180 kilomètres entre l’île et la Chine continentale.

Pékin, qui ne reconnaît pas cette ligne, revendique Taïwan comme faisant partie de son territoire. Un peu plus tard, une flotte chinoise de sept navires et cinq embarcations de garde-côtes ont été détectées autour de l’île de Kinmen, petite île dépendant de Taïwan et très proche de la Chine continentale.

Manœuvres chinoises permanentes

« C’est non seulement le plus grand nombre de navires chinois repérés dans les eaux territoriales de Kinmen, assure Ben Lewis, analyste américain de défense et spécialiste de la Chine, cofondateur du site PLATracker, mais ces navires n’étaient pas uniquement des gardes-côtes. » Ils ont été identifiés comme des bateaux de différentes agences de sécurité maritime chinoise.

« Cette situation a gravement porté atteinte à la paix, à la stabilité et à la sécurité de la navigation entre les deux rives du détroit, a blessé les sentiments des personnes des deux côtés du détroit et ne contribue pas aux échanges pacifiques entre les deux rives du détroit de Taïwan », ont déclaré les garde-côtes taïwanais.

Le site de Ben Lewis a en outre repéré le 8 mai la présence dans le détroit de Taïwan du navire de guerre américain, le USS Halsey. Ce qui pourrait expliquer la présence renforcée des navires chinois deux jours plus tard. De son côté, la marine américaine a expliqué que le destroyer « a procédé à une traversée de routine le 8 mai dans des eaux où les libertés de navigation en haute mer et de survol s’appliquent, conformément au droit international ». Cette traversée « démontre l’engagement des États-Unis à défendre le principe de la liberté de navigation pour toutes les nations », selon la même source, qui ajoute : « Aucun membre de la communauté internationale ne doit être intimidé ou contraint d’abandonner ses droits et libertés ».

La Chine veut envahir Taïwan

Pour Ming-Shih Shen, ancien colonel de l’armée taïwanaise et directeur de la division de recherche sur la sécurité nationale à l’Institut de défense nationale de Taipei, ce n’est pas la présence du navire américain qui explique ce que les Chinois appellent « une mission de surveillance ». À ses yeux, « la Chine veut montrer qu’elle s’installe légalement sur cet espace du détroit de Taïwan et qu’il lui appartient. Elle vise à effacer notre souveraineté sur ce territoire. »

Et ce, à moins de dix jours de l’investiture du nouveau président taïwanais, William Lai, 64 ans, élu en janvier dernier. Lai est considéré par Pékin comme un « dangereux indépendantiste » et on peut s’attendre à une multiplication des manœuvres militaires chinoises dans les mois à venir.